samedi 25 avril 2009

Conclusion

Finalement, cette expérience néo-zélandaise se terminera plus tôt que prévu. Nous avons vite compris qu'une année serait trop long. Une histoire de timing aussi. Rester une année aurait nous aurait contraint de rentrer à la fin de l'automne, pour reprendre le rythme de nos activités au tout début de l'hiver. Nous avons donc fait le pari de ne pas rester si longtemps. Nous sommes restés au final 5 mois en Nouvelle Zélande et avons pris un mois pour découvrir une toute petite partie de l'Australie, épopée qui se raconte en image dans le livre III de Nousdeux, Aventure en Australie.
Tout n'aura pas été raconté, parce que trop long, pas le temps ou plus encore, pas l'énergie, bien que certaines anecdotes auraient méritées une sauvegarde. Bah, elles resteront dans la tête des protagonistes jusqu'à ce que ceux ci les oublient ou les remplacent par d'autres. Ainsi soit-il.

dimanche 12 avril 2009

Fin de partie

 Il est temps que ça se termine. Les jours de pluies s'enchainent, il fait froid, la pomme de plus en plus rare. Les seules choses qui puissent encore motivées certains sont les bringues et les bières qui vont avec. Hangover et haleine de chacal, déjà que pour certains la  question de la rigueur hygiénique  se posait réellement. De fait, les groupes se font et se défont, les plus motivés s'enhardissant au fur et à mesure que l'ambiance est au grand n'importe quoi pourvu qu'on finisse tard, comme Sophie, et les autres, ceux qui veulent bien faire la fête pourvu que cela se termine à un moment donné et que tout redevienne calme et tranquille, comme Nono. Distorsion, pas la première mais très certainement faisant partie des plus sérieuses. Le navire tangue, prend l'eau, menace de chavirer un instant. Un instant seulement. Comment? c'est fini? Il pousse un ouf de soulagement, elle verse une petite larme. Leur destin est plus fort que ça, de toute façon...



vendredi 27 mars 2009

Le plus dur n'est pas forcément la chute...

Les journées s'enchainent et finissent par se ressembler un peu. Une routine s'installe. De la lassitude aussi, quelques petites tensions parfois, mais les gens qui ne s'apprécie pas arrivent dans l'ensemble à s'éviter. Depuis le début de la période de cueillette, beaucoup de monde est passé par Te Koha cueillir un panier, une caisse ou plusieurs tonnes de pommes. Beaucoup sont repartis, d'autres arriveront encore. Finalement, on se retrouve un petit noyau présent depuis le début, une petite communauté qui n'a pas toujours grand-chose à se dire mais qui cohabite, qui s'accepte et qui partage un  sacerdoce. Pendant la journée, chacun dans son rang, on est vite seul avec ses pommes et ses pensées. Avec Sophie, on discute un peu, on tire des plans sur la comète: il va falloir rentrer et même si le voyage en Australie se précise, il faudra bien qu'on trouve de quoi s'occuper une fois que nous aurons regagner la France, le Doubs, Pont de Roide... Les idées passent, elles nous semblent bonnes le temps de le dire ou plusieurs jours, puis elles se fanent comme un coquelicot dans un vase, comme si les sortir de nos têtes les tuaient. La seule chose qui paraisse une évidence, c'est qu'on en a soupé des boulots à deux balles. Servir, cueillir, nettoyer, c'est à peu près tout ce qu'on a fait pour gagner nos vies depuis bientôt deux ans et c'est assez usant et pas très rentable, minimum wage quoi. Alors on se dit qu'une fois en France, on se trouve un boulot, une formation, un métier qui nous permettra de repartir, histoire d'allier usage du monde et salaire décent... 
Bref, cueillir des pommes, encore et toujours, monter, redescendre, n'a rien de captivant et ça laisse de la place au cerveau pour se promener, rêvasser, se déconcentrer... 
C'est le début d'après-midi, il fait chaud et personne n'a vraiment envie de reprendre le boulot. C'est le troisième passage, les arbres sont touffus, les pommes rares. On escalade trois, quatre, cinq fois le même demi-arbres pour quelques fruits. Alors on s'agace. Il ne faudrait jamais s'agacer... Nono, l'arbre qu'il a devant lui l'énerve. Des grosses branches à un mètre du sol l’empêchent d'approcher l'escabeau suffisamment près pour ne pas avoir à jouer les acrobates pour deux misérables pommes. Et la poussière le démange. Et les feuilles des rosacées piquantes sur la peau desséchée par le soleil de l'hémisphère sud et sa couche d'ozone percée. Alors il jette le pied de l'escabeau dans l'arbre pour la cinquième fois. Ce dernier se pose quelque part hors de son regard mais à peu près bien pour donner l'illusion de la stabilité, il est paré à aller chercher les trois pommes qu'il convoite. Il s'élance, une, deux, trois, quatre, ci... la marche se dérobe sous son pied, puis c'est l'arbre qui se dérobe à son regard médusé presque en même temps que le ciel lui apparait, un ciel bleu, immaculé, brulant. Mais tout aussi instantanément, revoilà qu'il revoit le sol, vert, herbeux, et l'escabeau. Il va s'écraser comme une merde quelque part entre la première marche et un gros caillou gris... Et puis non. Le mouvement s'arrête, brusquement, plus brusquement encore que la chute avait débuté, en même temps que s'abat sur lui une averse de pommes. Alors le temps se fige sur une version up side down du monde. Le sol comme ciel, le ciel comme sol, dans une relative apesanteur. Le temps de comprendre ce qui venait de se passer et les premiers cueilleurs arrivent en courant, alertés par le cri qu’il n’a lui-même pas entendu. Ils arrivent et c’est rigolo, ils sont à l’envers, la tête en bas… On le décroche, assez facilement, et il ne sait pas s'il a mal. Il est secoué. On inspecte la jambe. Elle est déjà toute bleue. Quelqu’un dit qu’il faut de la glace. Smithy est emmerdé... De la glace? C’est Lucas je crois qui en trouve. Nous sommes à Hedges, nous sommes chez lui et notre Papa Schultz y a encore des réserves. Il revient, dodelinant avec un carton de steak haché premier prix du Pack and Save de Hasting. La semaine de cueillette de Nono est finie, les steaks de Lucas sont foutus. La mésaventure lui aura au moins rendu ce service-là.
Après contrôle par l’inspection du travail, il s’avère que Nono a merdé. Il a cru que le pied pivotant de l’escabeau était sur le sol, alors qu'il reposait sur l’une des grosses branches de l’arbre. En prenant appui sur l’escabeau, il a pensé que celui-ci était tanqué, mais lorsque il est arrivé à 2 mètres du sol, le principe d’Archimède se vérifiant, l’escabeau a fini de sa mise en place, le pied pivotant à glissé sur la branche et le tout à brutalement opéré une rotation, emportant la marche qu'il pensait trouver sous son pied à quelques centimètres plus au nord. La jambe est passée au travers de la marche jusqu’à la moitié du tibia, est s’est retrouvée coincée entre deux marches. Le corps de l'animal en fut renversé, et finalement, suspendu au plafond comme un petit cochon. Finalement, il connu une variante du fameux adage, à savoir la chute, mais sans l’atterrissage.
Erin l'emmène dans une petite clinique. Grosse contusion au niveau du mollet. Bon pour trois ou quatre jours off. Nous n’avons jamais parlé des frais de la consultation ni du coûts des médicaments. Merci beaucoup, même s'il n'est pas certain que cela
n'arrangeait que l'ami Nono...
Quelques jours plus tard, c'est au tour de Pavla, notre collègue tchèque, de se prendre le même type de gadin. A la différence notoire que Pavla a parcouru la totalité du chemin, de haut en bas, pour un résultat bien différent, à savoir une vertèbre cassée et trois semaines d'immobilisation totale! Il est vrai qu'elle et son compagnon n'étaient pas là que pour le fun. Ils avaient acquis la réputation de ne pas faire les choses à moitié, eux... Leur objectif avoué était d'engranger un maximum de fonds, donc de cueillir le plus de pommes que possible, et de prolonger leur périple jusqu'en Asie, jusqu'aux sommets de l'Himalaya, la haute chaine tibétaine... Raté. 

lundi 23 mars 2009

Happy birthday

Aujourd'hui c'est l'anniversaire de Nono. Notre rock-star a 27 ans, mais ne vous inquiétez pas, il n'a pas l'intention d'y rester cette année, n'en déplaise aux Jim, Jimmy, Janis, Brian ou Amy...
Au menu du repas de fête, lasagnes, Cheese-cake et binouzes... 
Chose remarquable, c'est également l'anniversaire de Dave. Cheers mate!

vendredi 20 mars 2009

La forêt des rêves bleus

Nous l'avons déjà fait remarquer dans les lignes de ce blog, la Nouvelle Zélande fut un jardin d’Éden jusqu'au jour où Homo sapiens sapiens a débarqué avec ses gros souliers, son agriculture et ses animaux domestiques. Avant ces temps pas si éloignés s'épanouissait là-bas tout une tripoté de tétrapodes ailés qui ne demandaient rien à personne. Bien sûr, ces animaux n'étaient pas en dehors des réseaux trophiques, j'entends par là que certains servaient de pitance à d'autres, mais plusieurs indices semblent indiqués que la pression de cette prédation n'était pas démoniaque et que tout ce petit monde ailé trouvait un équilibre, allez, j'y vais, vivait en harmonie dans le meilleur des mondes. Lecteur hypothétique, tant pis pour toi si tu trouves que je te refais le coup de l'Eldorado, mais si tu es toujours là, c'est peut-être parce qu'au fond, tu es d'accord avec moi...
Donc. On trouvait alors là-bas des animaux qui ne s'appelaient pas encore kakapo, takahé, kākā, kereru, kéa, kiwi, katipo, moa, kokopu ou tuataras ou weta mais nous nous éloignons du sujet.
Nousdeux, et c'est important de le signaler, ont chopé une addiction au pays du cacatoès marcheur et polygame, une véritable obsession qui ne les lâche plus depuis : l'ornithologie.
C'est d'autant plus intéressant à signaler que, avant de partir, l'absence de mammifères endémiques comme les lions, les hyènes ou les koalas et la projection que nos excursions naturalistes balbutiantes ne seraient finalement rien d'autres que des sorties sur les traces de l'avifaune, laissaient nos amis un peu sceptiques.
En ce début de semaine, et puisqu'on leur laisse trois jours de repos (en fait c'est aux pommes que l'on laisse trois jours de repos, mais j'en conviens, le résultat est le même), Nousdeux partent à l'assaut d'une zone désormais dés-infestées de prédateurs exogènes : Kapiti island.
L'île est à la fois une réserve naturelle, une nurserie pour des espèces endémiques de l'île nord et de l'ile sud, de nombreux individus ayant été "introduits" sur l'ile, et une Réserve Marine, dont le principe est le même pour des espèces aquatiques.
Sur la brochure, on annonce la couleur. Liste des oiseaux trouvant refuge sur les vingt kilomètres carré pêle-mêle et de manière non-exaustive:
  • le Takahé (Porphyrio hochstetteri), Liste rouge de l'UICN  300 couples à l'état sauvage,
  • le Kokako (Callaeas cinereus) Liste rouge de l'UICN  400 couples à l'état sauvage, ce dit Glaucope cendré dans la langue de Molière
  • le Stitchbird (Notiomystis cincta), Classé vulnérable par l'UICN, 1000 couples à l'état sauvage, est appelé Méliphage hihi dans la langue de Devos
  • le Saddleback (Philesturnus carunculatus) ou Créadion rounoir, dans la langue de Céline, en bonne voie de reconstitution des effectifs là où ils sont à l’abri des prédateurs ;
  • le Ruru (Ninox novaeseelandiae), ou Morepork ou encore Ninoxe boubouk dans la langue de Ribéry ;
  • le North Island Robin ( Petoica longipes) ou miro de Garnot dans la langue de Matisse ;
  • le Kakariki à front rouge (Cyanoramphus novaezelandiae) ou Perruche de Sparrman dans la langue de François Perusse ;
  • le New Zealand Bellbird  (Anthornis melanura) ou méliphage carillonneur dans la langue de mgr Lustiger ;
sans oublier les emblématiques kiwis bruns (Apteryx mantelli ; Classement UNIC : En danger mais les effectifs remontent) et kiwi d'Owen (Apteryx owenii ;Statut UICN : Quasi menacé)...
Navette et entrées bookées (pour préserver la quiétude des oiseaux, le nombre de visiteurs est limité), nous sommes prêts à vivre une expérience d'avant les hommes, une sorte d'aventure originelle, un peu réchauffée et artificielle, mais une expérience significative et nous n'avons pas mis longtemps avant de nous en rendre compte.
Ce qui est étonnant dans l'avifaune de ce pays, c'est que la prédation par les mammifères n’est pas inscrite dans la culture de ces animaux. De ce fait, les oiseaux se montrent souvent, au pire, distants et indifférents, au mieux curieux voire accueillants, mais jamais ou que très rarement méfiants et fuyant. Une preuve de plus s'il en était besoin est l'accueil que nous réservèrent dès la descente du bateau un gros Weka, déambulant telle une grosse poule dans sa bassecour sans nous prêter la moindre attention, et plus surprenant, et pour tout dire, inoubliable, celui du Kaka, autre perroquet endémique et non moins symbolique des iles néozélandaises que peuvent l'être le kiwi, le kakapo ou plus proche, le Kéa...
A peine avons eu le temps de sortir du bateau donc et sans même attendre que l'agent de la réserve ne finisse son discours, le gros perroquet débarquait pour se présenter. De branche en branche, tournant autour de Sophie, se posant sur le kiosque, tentant une seconde approche, l'accueillant animal, finalement, se pose sur Sophie, qui dans un effort remarquable pour contenir une appréhension légitime face à un oiseau de la taille d'une corneille et doté, on a tôt fait de s'en apercevoir, de belles serres et d'un bec immense. Nous pourrons jouer avec lui plusieurs minutes, prenant forces clichées, entre rires, surprise et stupéfaction... Et malgré l'originalité de la rencontre, il arrive un moment où nous nous rendons à l'évidence qu'il faut prendre congé de notre ami. Nous n'avons que quelques heures devant nous avant que la navette ne largue les amarres, et même s'il aurait été malicieux de se faire oublier et de passer la nuit sur la plage. 
Nous entamons la montée jusqu'au point culminant de l'île, à environ 500 mètres d'altitude, quelques heures de marche à notre rythme d'explorateur de la canopée, jumelles 8X21 autour du coup, achetées 12 dollars dans un Sporthek de Vancouver et un Bridge Sony...
Il se passe une chose déterminante lors de cette ascension. Nousdeux prennent conscience d'une donnée fondamentale dans la prise en compte de l'environnement dans lequel ils évoluent, le paysage sonore. Pour la première fois, nous réalisons à quel point les forêts sont sonores, musicales. Pas en termes d'harmonies dans le sens vertical, mais des mélodies lancées par-ci par-là, par des musiciens plus ou moins virtuoses selon l'espèce, impliqués à vanter son patrimoine génétique, à perpétuer son espèce malgré les aléas de l’anthropocène.
Le long de notre parcours forestier, nous rencontrerons par le regard ou les oreilles le fameux Saddelback, le très élégant Fantail, le roucoulant Pigeon de Nouvelle-Zélande ou Kereru, le facétieux Robin de l’ile Nord, le rare Stitchbird, le débonnaire Bellbird, l’hurluberlu tui et le coloré kakariki… Puis il est l’heure de regagner la plage.


Nous sommes en avance. Le temps de photographier trois Karuhiruhi, des cormorans variés, de regarder passer les mouettes et les fous, le cul sur la grève, dans cette fin d’après-midi ensoleillé et finalement la navette arrive. On s’approche mais il n’est pas encore l’heure de monter à bord. Sur le quai, deux caisses et des gens autour en shorts et bottes. Les caisses nous intriguent, mais savoir vraiment comment, on devine ce qu’il y a l’intérieur. Deux kiwis, deux Apteryx owenii. Nous partagerons la traversée avec eux. Première rencontre avec l’espèce emblème du pays, point final et drôle de sensation. On retourne à Te Koha en passant par un centre de conservation des animaux du pays, voire le rarissime Kokako et les kiwis en chambre noire, et surtout s'assurer que les bestioles en cage ne sont définitivement pas notre came.