samedi 7 mars 2009

A la douche

Les gens vont et viennent mais au bout d'une semaine, et même si pas mal de saisonniers logent sur un autre verger (Hedges), il commence à y avoir pas mal de monde sur place. Ce n'est pas un problème pour ce qui est de l'utilisation de la cuisine, et cela grâce au community cooking qui voit adhérer la presque quasi-totalité de l'effectif, à l’exception des deux couples de Tchèques, sans doute dégoutés à jamais du collectivisme.
Le véritable problème se pose quant à l'utilisation des sanitaires. Il n'y a qu'une seule douche, qu'une seule chiotte, qu'un unique lavabo et nous somme douze, et bientôt quatorze, sans compter que ces humbles commodités hébergent également de temps à autres les poules du quartier...
Alors c'est long. Très long. Trop long ? Nousdeux ne se plaignent pas. Non, le seul vrai hic, c'est que personne n'a eu l'idée de proposer le community cleaning et que la seule personne qui se soit portée volontaire pour y passer un coup d'eau de javel, c'est Sophie, parfois suppléée par Nono, notamment lorsque le lavabo est bouché et que tout le monde continue de se laver les dents dans le marigot qui prend des teintes verdâtres, qui se charge des glaires jaunâtres des uns, des miasmes laiteux des autres...
Puisque nous sommes là pour partager, partageons :
Il faut bien avoir à l'esprit que nous travaillons TOUS dans les champs, à l'ombre bien souvent, mais par des températures de 80° Fahrenheit en moyenne (30° Celcius environ), que nous avons tous la vingtaine, que certains accusent un certain surpoids voire même une certaine rousseur, que nous passons le plus clair de notre temps libre à boire et à fumer, et que si les repas sont préparés avec amour, ils sont le plus souvent hyper-protéinés... Alors très vite, on rentre dans la douche en prenant les plus vives précautions pour ne pas toucher le murs ou le rideau de douches, qui ont pris une teinte rosées-orange, voire noirâtres dans certains recoins, et il faut être très motivé pour passer aux toilettes derrière n'importe lequel des gros mâles de la troupe, que le sol du lieu d'aisance est bientôt recouvert de petits poils bouclés multicolores: cheveux, poils de barbes, de culs, de bites et de chattes, de diverses fientes de poulets, de plumes, de feuilles et de poussières...
Enfin, si la vie en collectivité était si simple, cela se saurait. 
Du coup, nous hésitons à en parler. Déjà, nous avons fait preuve d'initiatives en proposant le community cooking, nous pensons qu'une nouvelle proposition pourrait être prise pour de l'autoritarisme ou une forme de pression à l'égard d'un groupe où personne n'a cherché à imposer quoi que ce soit à qui que ce soit. Alors, lorsque Erin et Clare proposent à Nousdeux de venir prendre leur douche chez eux afin de désengorger l'accès à la douche, nous acceptons et la moitié du problème se règle tout seul. 
Cet épisode, quoi qu’anecdotique et, si l’on veut, burlesque, semble montrer à quel point l’auto-organisation n’est pas innée. En l'absence de leader, et c'est Erin qui nous l'a raconté par la suite, le groupe ne s'organise pas tout seul. Il faut que quelqu'un propose, que les autres acceptent. Il se peut également que quelqu'un impose, et que les autres suivent pour avoir la paix ou par crainte ou parce que nous sommes conditionnés à obéir. Nous aurions du proposer, il était évident qu'il fallait proposer l'organisation du nettoyage des communs, proposer autour d'une bière,des temps de parole, d'échanges, de mise au point... Nous aurions du proposer que s'instaure une organisation, puisque aucun tyran n'émergeait du groupe, cela aurait pu marcher. Nousdeux nous n'étions pas prêt à être les intendants ni les tuteurs du groupe. Par le fait, le groupe ne s'est auto-géré que pour le minimum. Dommage.


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