vendredi 20 mars 2009

La forêt des rêves bleus

Nous l'avons déjà fait remarquer dans les lignes de ce blog, la Nouvelle Zélande fut un jardin d’Éden jusqu'au jour où Homo sapiens sapiens a débarqué avec ses gros souliers, son agriculture et ses animaux domestiques. Avant ces temps pas si éloignés s'épanouissait là-bas tout une tripoté de tétrapodes ailés qui ne demandaient rien à personne. Bien sûr, ces animaux n'étaient pas en dehors des réseaux trophiques, j'entends par là que certains servaient de pitance à d'autres, mais plusieurs indices semblent indiqués que la pression de cette prédation n'était pas démoniaque et que tout ce petit monde ailé trouvait un équilibre, allez, j'y vais, vivait en harmonie dans le meilleur des mondes. Lecteur hypothétique, tant pis pour toi si tu trouves que je te refais le coup de l'Eldorado, mais si tu es toujours là, c'est peut-être parce qu'au fond, tu es d'accord avec moi...
Donc. On trouvait alors là-bas des animaux qui ne s'appelaient pas encore kakapo, takahé, kākā, kereru, kéa, kiwi, katipo, moa, kokopu ou tuataras ou weta mais nous nous éloignons du sujet.
Nousdeux, et c'est important de le signaler, ont chopé une addiction au pays du cacatoès marcheur et polygame, une véritable obsession qui ne les lâche plus depuis : l'ornithologie.
C'est d'autant plus intéressant à signaler que, avant de partir, l'absence de mammifères endémiques comme les lions, les hyènes ou les koalas et la projection que nos excursions naturalistes balbutiantes ne seraient finalement rien d'autres que des sorties sur les traces de l'avifaune, laissaient nos amis un peu sceptiques.
En ce début de semaine, et puisqu'on leur laisse trois jours de repos (en fait c'est aux pommes que l'on laisse trois jours de repos, mais j'en conviens, le résultat est le même), Nousdeux partent à l'assaut d'une zone désormais dés-infestées de prédateurs exogènes : Kapiti island.
L'île est à la fois une réserve naturelle, une nurserie pour des espèces endémiques de l'île nord et de l'ile sud, de nombreux individus ayant été "introduits" sur l'ile, et une Réserve Marine, dont le principe est le même pour des espèces aquatiques.
Sur la brochure, on annonce la couleur. Liste des oiseaux trouvant refuge sur les vingt kilomètres carré pêle-mêle et de manière non-exaustive:
  • le Takahé (Porphyrio hochstetteri), Liste rouge de l'UICN  300 couples à l'état sauvage,
  • le Kokako (Callaeas cinereus) Liste rouge de l'UICN  400 couples à l'état sauvage, ce dit Glaucope cendré dans la langue de Molière
  • le Stitchbird (Notiomystis cincta), Classé vulnérable par l'UICN, 1000 couples à l'état sauvage, est appelé Méliphage hihi dans la langue de Devos
  • le Saddleback (Philesturnus carunculatus) ou Créadion rounoir, dans la langue de Céline, en bonne voie de reconstitution des effectifs là où ils sont à l’abri des prédateurs ;
  • le Ruru (Ninox novaeseelandiae), ou Morepork ou encore Ninoxe boubouk dans la langue de Ribéry ;
  • le North Island Robin ( Petoica longipes) ou miro de Garnot dans la langue de Matisse ;
  • le Kakariki à front rouge (Cyanoramphus novaezelandiae) ou Perruche de Sparrman dans la langue de François Perusse ;
  • le New Zealand Bellbird  (Anthornis melanura) ou méliphage carillonneur dans la langue de mgr Lustiger ;
sans oublier les emblématiques kiwis bruns (Apteryx mantelli ; Classement UNIC : En danger mais les effectifs remontent) et kiwi d'Owen (Apteryx owenii ;Statut UICN : Quasi menacé)...
Navette et entrées bookées (pour préserver la quiétude des oiseaux, le nombre de visiteurs est limité), nous sommes prêts à vivre une expérience d'avant les hommes, une sorte d'aventure originelle, un peu réchauffée et artificielle, mais une expérience significative et nous n'avons pas mis longtemps avant de nous en rendre compte.
Ce qui est étonnant dans l'avifaune de ce pays, c'est que la prédation par les mammifères n’est pas inscrite dans la culture de ces animaux. De ce fait, les oiseaux se montrent souvent, au pire, distants et indifférents, au mieux curieux voire accueillants, mais jamais ou que très rarement méfiants et fuyant. Une preuve de plus s'il en était besoin est l'accueil que nous réservèrent dès la descente du bateau un gros Weka, déambulant telle une grosse poule dans sa bassecour sans nous prêter la moindre attention, et plus surprenant, et pour tout dire, inoubliable, celui du Kaka, autre perroquet endémique et non moins symbolique des iles néozélandaises que peuvent l'être le kiwi, le kakapo ou plus proche, le Kéa...
A peine avons eu le temps de sortir du bateau donc et sans même attendre que l'agent de la réserve ne finisse son discours, le gros perroquet débarquait pour se présenter. De branche en branche, tournant autour de Sophie, se posant sur le kiosque, tentant une seconde approche, l'accueillant animal, finalement, se pose sur Sophie, qui dans un effort remarquable pour contenir une appréhension légitime face à un oiseau de la taille d'une corneille et doté, on a tôt fait de s'en apercevoir, de belles serres et d'un bec immense. Nous pourrons jouer avec lui plusieurs minutes, prenant forces clichées, entre rires, surprise et stupéfaction... Et malgré l'originalité de la rencontre, il arrive un moment où nous nous rendons à l'évidence qu'il faut prendre congé de notre ami. Nous n'avons que quelques heures devant nous avant que la navette ne largue les amarres, et même s'il aurait été malicieux de se faire oublier et de passer la nuit sur la plage. 
Nous entamons la montée jusqu'au point culminant de l'île, à environ 500 mètres d'altitude, quelques heures de marche à notre rythme d'explorateur de la canopée, jumelles 8X21 autour du coup, achetées 12 dollars dans un Sporthek de Vancouver et un Bridge Sony...
Il se passe une chose déterminante lors de cette ascension. Nousdeux prennent conscience d'une donnée fondamentale dans la prise en compte de l'environnement dans lequel ils évoluent, le paysage sonore. Pour la première fois, nous réalisons à quel point les forêts sont sonores, musicales. Pas en termes d'harmonies dans le sens vertical, mais des mélodies lancées par-ci par-là, par des musiciens plus ou moins virtuoses selon l'espèce, impliqués à vanter son patrimoine génétique, à perpétuer son espèce malgré les aléas de l’anthropocène.
Le long de notre parcours forestier, nous rencontrerons par le regard ou les oreilles le fameux Saddelback, le très élégant Fantail, le roucoulant Pigeon de Nouvelle-Zélande ou Kereru, le facétieux Robin de l’ile Nord, le rare Stitchbird, le débonnaire Bellbird, l’hurluberlu tui et le coloré kakariki… Puis il est l’heure de regagner la plage.


Nous sommes en avance. Le temps de photographier trois Karuhiruhi, des cormorans variés, de regarder passer les mouettes et les fous, le cul sur la grève, dans cette fin d’après-midi ensoleillé et finalement la navette arrive. On s’approche mais il n’est pas encore l’heure de monter à bord. Sur le quai, deux caisses et des gens autour en shorts et bottes. Les caisses nous intriguent, mais savoir vraiment comment, on devine ce qu’il y a l’intérieur. Deux kiwis, deux Apteryx owenii. Nous partagerons la traversée avec eux. Première rencontre avec l’espèce emblème du pays, point final et drôle de sensation. On retourne à Te Koha en passant par un centre de conservation des animaux du pays, voire le rarissime Kokako et les kiwis en chambre noire, et surtout s'assurer que les bestioles en cage ne sont définitivement pas notre came.





dimanche 15 mars 2009

Cape Kidnappers





Il pleut. Day off!

On profite pour roupiller jusqu'à 11 heures et demie. En même temps, vu la bringue de la veille, il y aurait eu fort à parier pour que notre rendement aurait été plutôt médiocre. Gueule de bois et pluie mais motivation quand même. En début d'après-midi, on embarque Ulrica et Simon pour une troisième tentative de parcourir Cape Kidnappers, ou Te Kauwae-a-Māui en maori. Promenade en bord de mer, le long d'une falaise de sable et de charbon. Il faut être à l'heure au rendez-vous car l'accès aller et retour est fonction de la marée. On se renseigne sur place. Apparemment, nous sommes juste dans les temps, à peine à marée descendante. La balade est vraiment sympa, le paysage assez spectaculaire. Les couches se superposent : Sandstone, Greywacke, C1C... La géologie du site est impressionnante, que des cas d’école : sédimentation, érosion et tectonique des plaques dans toute leur splendeur.
Aussi, l'endroit est réputé pour ce qu'il héberge un des plus vastes sites de nidification de fou austraux (Morus serrator), tout du moins, en milieu continental. Entre temps, on aura pu observer Grand cormoran (Phalacrocorax carbo), Huitrier variable (Haematopus unicolor), Goéland dominicain (Larus dominicanus), la mère et le fil, un Pipit de Nouvelle-Zélande (Anthus novaeseelandiae), un couple de Martins-chasseur sacrés (Todiramphus sanctus), et un moteur de Super cinq (C1C) complétement fossilisé.

Aussi, l'endroit est réputé pour ce qu'il herbége  un des plus vastes site de nidification de fou austraux (Morus serrator), tout du moins, en milieu continental. Entre temps, on aura pu observer Grand cormoran ( Phalacrocorax carbo), Huitrier variable (Haematopus unicolor),Goéland dominicain (Larus dominicanus), la mère et le fil, un Pipit de Nouvelle-Zélande (Anthus novaeseelandiae), un couple de Martins-chasseur sacrés (Todiramphus sanctus), et un moteur de Super cinq (C1C) complétement fossilisé.