jeudi 25 décembre 2008

Jeudi

25 décembre 2008

Une lumière pâle et timide éclaire la pièce lorsque nous ouvrons les yeux. Triste nouvelle en ce 25 décembre, le père noël nous a oubliés. Nous nous jetons sur la fenêtre dans l'espoir d'apercevoir néanmoins un peu de ciel bleu et quelque chose du paysage qui, d'après les commentaires laissés dans le registre, est grandiose des fenêtres de la hut. Malheureusement, la visibilité est limitée à quelques centaines de mètres et la pluie tombe toujours aussi fort.
C'est d'abord un redoutable sentiment d'abattement qui nous emporte dans une déferlante de lamentations. Un autre jour à marcher 5 heures sous la pluie, voilà le programme de notre jour de Noël. Nous émettons l'hypothèse de rester ici pour la journée. Nos provisions sont suffisantes pour tenir six jours complets et nous avons prévu d'être de retour à Whakapapa samedi matin. Nous pourrons même, si nécessaire, ne pas faire de halte dans la dernière hut qui n'est qu'à 3 heures de marche du hameau. Les minutes s'égrènent lentement et l'idée nous parait bientôt mauvaise.
Coûte que coûte il nous faut avancer. Pas question de moisir ici un jour de plus.
On se motive. L'important est de partir gonflé à bloc.
Nous nous élançons sur le sentier entrecoupé de touffes de tussocks détrempées. Après quinze minutes, le premier ruisseau que nous devons traverser à gué finit de nous remplir les godasses. Après vingt minutes, nous sommes aussi mouillés que possible.

Pendant deux heures, même topo que la veille. Parcourt du combattant au milieu des marécages et des forêts blanches et bleues puis nous gagnons de nouveau la beech forest, plus verte, moins morbide, mais tout aussi humide et froide.

Quelques instants avant de rejoindre Ohakune mountain road, nous croisons un couple remontant le chemin. Ils sentent le propre et les douces fragrances d'after shave et d'eau de Cologne nous rappellent au bon souvenir des douches quotidiennes.
Nous papotons pendant cinq minutes. Ils sont très étonnés lorsque nous leur affirmons qu'ils sont les premiers humains, et pratiquement les premiers êtres vivants (monde végétale excepté) que nous voyons depuis plus de deux jours.

Cinq cents mètres plus tard, nos pas foulent le bitume. Pas de pancarte ici. Pas d'indication non plus sur le descriptif de la marche que nous trimballons avec nous et qui commence à devenir très peu lisible. Nous interrogeons notre semblant de carte. Il faut prendre à droite, il faut monter.

De là, nous entamons la pire épreuve de la marche. Remonter une route qui ne mène nulle part mais qui reste invraisemblablement fréquentée. Nous avons été surpris de trouver du macadam, nous le sommes encore plus devant le nombre de véhicules plus ou moins lourds qui gravissent la côte, refoulant autant que possible une quantité effroyable de gaz d'échappement que nous respirons à pleins poumons, et qui redescendent après quelques trop courts instants.
Comble de la perfidie, il nous parait de plus en plus évident que le temps que nous allons passer sur cette route n'est pas pris en compte dans le temps donné de parcourt.

Sophie perd un peu de sa patience, puis c'est autour de Nono de s'énerver. Nous sommes pourtant presque tout au-dessus. La pluie n'est plus qu'un crachin minable et nous manquons presque d'apercevoir la silhouette majestueuse qui se découpe à l'horizon. Un magnifique cerf coiffé de bois immenses nous observe de loin.

Enfin une pancarte. Nous sommes de retour sur le sentier après ce bref retour à la réalité. La hut est à deux heures de marche. Confirmation que l'heure de grimpette en compagnie des autos et de leurs passagers ahuris ne fait pas partie de la rando.

Nous pestons une dernière fois avant de reprendre la route, lorsque surgit d'entre les nuages un rayon de soleil. Nous prenons ce petit bout de ciel bleu comme une récompense à nos efforts. Ce petit rien de réconfort nous revigore.
Au fur et à mesure de notre progression, le ciel s'ouvre. La grisaille qui a été notre lot quotidien pendant deux jours laisse maintenant la place au bleu du ciel et nous apercevons même par instant des pans entiers de montagne. C'est le retour du Ruapehu après deux jours d'absence.

D'un peu plus loin, nous distinguons le toit gris de la hut, lovée dans un petit bois tout en bas, au fond de la vallée. Nous mesurons ainsi la route qu'il nous reste à parcourir avant de pouvoir ôter nos chaussures.

Toute une partie de la descente se pratique sur de la roche extrêmement glissante. Cette partie, bien que très passionnante, est également très stressante. Nous prenons notre temps et en atteignons le point bas sans bobo.

Encore un ou deux kilomètres à parcourir dans la plaine, deux ou trois ruisseaux à traverser à gué, un petit pont de bois et c'est l'arrivée à la hut. Surprise, elle est habitée. Nous prenons notre temps avant de rentrer à l'intérieur. Nous y trouvons Peter and James, le père et le fils, en retraite pour les fêtes de Noël. Échanges courtois et ambiance feutrée. Toutes les paroles sont dites à voix basse, comme pour ne pas perturber la sérénité qui se dégage de l'endroit, et avec cette humilité et cette simplicité souvent caractéristiques de ceux qui crapahutent sac au dos.

La fin d'après-midi s'écoule doucement. Allongés sur nos matelas, jamais ne rien faire du tout ne nous avait paru aussi agréable. Nous contemplons depuis l'immense baie vitrée les nuages qui galopent sur le volcan. Bientôt, une ombre remontera de la plaine jusqu'à son sommet, dévorant la lumière du jour et annonçant l'irrémédiable approche de la nuit. Toujours dans le silence et à mesure que l'obscurité gagne du terrain, chacun retrouve la chaleur de son sac de couchage pour y attendre le sommeil sereinement.

2 commentaires:

  1. bell333.blogspot.com Hello my name is Bell from Thailand.

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  2. Je continue de boire vos paroles (enfin écrits plutôt) mais est ce que vous êtes rentrés oui ou non?Je commence à me poser la question...

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