jeudi 1 janvier 2009

Gisborne

Petit matin sur Gisborne. Une grosse mouette noire et blanche nous épie au travers du pare-brise moucheté. Déjà le soleil fait monter la température et nous sommes parmi les premiers hommes à voir le jour se lever sur la nouvelle année. Des vapeurs d'alcool circulent outrageusement dans la voiture. Nous atteignons ce matin un niveau de puanteur rarement égalé. Il est urgent d'ouvrir les fenêtres. Urgent de s'extirper hors de l'habitacle. Urgent de respirer un air plus pur. Hier soir on nous a averti qu'une douche était à disposition du public près du camping de la plage. On sait où c'est. Le temps de redresser les fauteuils et on y file.
Sur place c'est le calme plat. La ville se remet tout doucement de la soirée et on imagine les gens digérant leur gueule de bois sous la douceur satinée des draps et dans la fraîcheur d'une chambre à coucher, un petit courant d'air faisant nonchalamment ondoyer les rideaux de flanelle. Nono entre dans le vestiaire des hommes. Il y trouve comme convenu la douche et une effroyable odeur de pisse. Le mâle de l'espèce humaine, avec ses airs de primate, ressemble plus au chien qu'au singe lorsqu'il sort sa bite pour inonder d'urine les lieux publics. Je sais de quoi je parle. Bref. Il s'en retourne à la voiture prendre quelques affaires. La gueule dans le cul, les reins en compote et les idées en stand-by, il coule lentement jusqu'à la douche, la première depuis Taupo et abracadabra! L'eau délicieusement froide, l'odeur du shampoing et un rayon de soleil transperçant la couche de crasse des vasistas courent sur sa peau nue. Il y a des moments dans la vie où, malgré la merde dans laquelle nous pataugeons et que certains semblent prendre du plaisir à étaler, des moments où l'on se retrouve touché du doigt par une espèce de puissance divine. Des moments comme ça où l'on se sent prêt à marcher sur l'eau, soulever des montagnes ou faire l'amour au monde entier. A cet instant précis Nono, incroyablement vivant, intensément serein, remercie le grand esprit pour cette énergie indicible qui court au travers de l'univers et qui lui offre généreusement un tour sur sa mobylette dorée.
Il sort de la douche et, la serviette autour des reins, se rue en dehors du vestiaire de sorte à ce que l'ambiance latrines de festival ne nuisent pas trop à sa plénitude retrouvée. Sophie récupère le vanity-case et s'enfuit chez les dames. Assis sous un gros hêtre, Nono attend sa douce. Il contemple les rayons de soleil qui se fracassent en mille morceaux scintillant sur le dos de l'océan. Derrière lui l'humanité reprend lentement possession des lieux. Certains partent pour un jogging, d'autres sortent leur chien, d'autres leur canoë de mer tandis que d'autres, indolents ivrognes, récupèrent sans grand combat leurs esprits abandonnés un peu plus tôt dans l'alcool. Le constat est toujours le même, il y a de grandes chances que l'année qui débute ne soit pas bien différente de la précédente.
La douche a presque aussi bien réussi à Bonnie qu'elle ne fut bénéfique à Clyde. Un petit tour par un coffee shop au bord de l'eau, un grand café très noir, jus d'orange glacé, pan cakes, le tout à l'ombre et à l'écart. Nous sommes définitivement requinqués.


Nous tachons de garder le tempo toute la journée. Petites visites calmes, longues siestes à l'ombres puis nous reprenons le chemin de Te Koha. Après un détour par Mahia Beach, nous plantons notre tente dans un petit camping, à deux heures de Hasting, pour une dernière nuit loin de tout, là-bas, à l'autre bout du monde.

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